Tiens, j'avais encore jamais vu cette thématique avant, je me permets à mon tour un bref tractage si vous permettez (l'intervention d'Olivier m'était passée complètement inaperçue, désolé).
Comme certains, j'ai voté pour la dernière option.
Non pas que l'éternelle énigme du prog' -pris au sens large- m'en touche une sans faire osciller l'autre, ni même que l'évocation seule du nom de Jean-Luc Ponty me renvoie à l'idée de pisser dans un violon ; mais bel et bien parce que j'estime, comme il a déjà très bien été dit auparavant dans le sujet, que la labellisation à outrance qui a tendance à sévir de plus en plus durement dans notre triste époque, et qui consiste à vouloir systématiquement cloîtrer les idées ou les individus dans des cases inamovibles, inaliénables et irréversibles tout en leur imposant le sceau infect de l’étiquetage axiomatique d'un concept abstrait et vide de sens au possible, est probablement un des pires travers nuisant à la musique contemporaine -de nouveau au sens large-, et que ces penchants industriels de pédanterie pseudo-intellectuelle bidon de la presse décharge-grand public ont une propension graduelle à m'insupporter jusqu'à atteindre l'abjection la plus malsaine.
Bien au contraire d'ailleurs, et je suppose que ça a légèrement du commencer à transparaître ici aussi depuis le temps, puisque j'ai souvent tendance à passer pour le mordu de prog' auprès des gens qui me connaissent (réputation tout de même un peu trop facile et évidente à donner pour quelqu'un né avec 25 ans de retard et qui admire ce genre parmi tant d'autres), quand bien même l'estampillage progressif en question, strictement en ce qui me concerne, provient bien plus largement de la vague éponyme des '70s que de sa contrepartie baignée dans la lave en fusion de tous types de rejetons du
Heavy forgé dans le plus pur et dur acier donnant son nom au 3ème choix.
La façon dont je conçois le prog' (et là je confonds LEROCK et LEMETAL), ou plutôt ce que j'en attends, consiste naïvement et simplement à être sempiternellement, et un tant soit peu agréablement si possible, surpris par la musique.
Ce qui peut notamment faire appel à une construction atypique, voire archaïque, des morceaux, l'agrémentation d'instruments ou de sonorités insolites, exotiques et inattendues, des changements déroutants de signature ou des évolutions rythmiques imprévues, aussi bien qu'à des phrasés lancinants de guitare claire suraiguë ou de plages atmosphériques reposant uniquement sur le plus simple appareil de nappes de Moog, Mellotron ou Hammond au même titre que les notes virginales (au sens acoustique) émanant d'un simple piano à queue ou d'une mandoline ; sans qu'autant d'exemples constituent pour autant des conditions nécessaires à mon appréciation de ladite musique.
Là où une composition recherchée attirera davantage mon attention, je m'éclate toujours autant à secouer les cervicales sur les plus naturelles progressions binaires de
power chords classiques sur les mesures génériques qui ont fait le succès du
Hard ou du
Thrash.
C'est d'ailleurs ce qui permet de distinguer les vieux cons-descendants snobinards pseudo-élitistes habitués de l'Olympia qui s'offusquent dès que je chante avec passion tout en versant un peu trop fort dans le
headbang, tandis que, tout comme les premiers de la classe ultra-pédants, comme mentionnés précédemment à travers ces pages, et dissertant en vain sur la suprématie technique d'untel ou untel -et qui heureusement ne fondent pas la totalité du public prog' qui soit-, ils observent le spectacle de loin, en silence et dans le marbre le plus glacial de l'insensibilité, comme on irait visiter une galerie d'art.
Ces gens-là (histoire de rester dans le contexte en compagnie de Brel), existent bel et bien sans surprise dans le cadre du
Rock prog' également, et deviennent rapidement tout aussi nuisibles dans leur fermeture d'esprit ou leur conservatisme que peuvent l'être les Blackeux fondamentalistes à tendance nationale socialiste amateurs dans leur attitude, ou, par extrapolation, n'importe quelle sorte de puriste hautain et borné, à l'image d'un style musical dont ils vantent pourtant les mérites à la base.
Là où je veux en venir, c'est que des cons pareils, on en trouvera toujours partout, et que dans l'absolu, je me sens autant de points communs entre les éternels hardos / thrasher agités et le progueux plus fantasque m'ayant ouvert les yeux sur ce qui est devenu mon style de prédilection qui sommeillent tous en moi ; et que la durée, la technique ou la démonstration sont pour moi autant de critères superflus qui passeront toujours après une chose essentielle : le ressenti personnel doublé d'un véritable travail de recherche sensoriel explorant des horizons nouveaux, à défaut d'épater ladite galerie.
Si originalité il y a, c'est du luxe, mais je peux tout aussi bien me contenter de compositions élaborées qui portent pourtant (il est de toute façon assez rare de faire honneur à ses inspirations s'en les invoquer un minimum) en elles l'empreinte encore chaude des relents des maîtres à penser des zicos du groupe en question.
Et là où les plus rabat-joie avanceront que ça en devient niais ou mielleux, des touches joyeuses, voire foncièrement festives, principalement apportées par les synthés ou les guitares, et qui viennent parfois raviver le prog' en lui conférant cet aspect radicalement gai (je pense avant tout à
Yes ou
Marillion) sont capables de me procurer autant de bonheur que les notes bien plus obscures et torturées issues, de la combinaison inquiétante de percussions hiératiques à l'avalanche chaotique d'effets de gratte -
slide ,
delay ou
flanger exagérés en tête- (
Pink Floyd ou
Camel), d'une part, ou de la distorsion d'une basse ou le désespoir d'un violon ou d'un saxophone (
King Crimson ou
Van Der Graaf Generator), voire encore la mélancolie infinie générée par l'intervention soliste par intermittence d'une flûte traversière rompant délicatement les nuances de silences reposant sur l'estompement de nappes angoissantes (
Änglagård, histoire de rattraper la diligence du Crescendo en route).
C'est effectivement là aussi qu'on peut dresser le parallèle avec les bienfaits du
Jazz sur le prog' -et bien évidemment le
Jazz Fusion par transitivité-, devenu plus aventureux à cette occasion ; je pense avant tout à la présence croissante de cuivres au sein d'orchestres de plus en plus diversifiés, les renommés exemples de
Mothers of Invention,
Chicago ou
Mahavishnu Orchestra faisant autorité en le domaine.
Je peux comprendre que la musique de certains groupes de la catégorie progressive puisse être davantage appréciée par des musiciens chevronnés, ou du moins (ayant) expérimentés, le tout impliquant probablement une meilleure ouverture d'esprit ou écoute au sens large, avant de pouvoir pleinement assimiler, et donc apprécier les moins accessibles secrets dont elle regorge.
Je précise simplement qu'étant un bien piètre musicien (ma Precision azure me fait les gros yeux en ce moment même depuis son piédestal trop peu souvent libéré), ce cas précis est loin de me concerner, mais que la découverte initiatique d'une musique, quelle qu'elle soit, fera toujours partie intégrante du processus analytique indispensable à son appréciation à sa juste valeur, toujours à mon sens.
Pour en revenir brièvement à la classification actuelle, si l'on pourra encore une fois s'étonner de la catégorisation immédiate et sans équivoque d'un groupe comme étant progressif sous prétexte qu'à certains rares égards, tel ou tel morceau un peu longuet sorte légèrement des sentiers battus (les hauts lieux TRVE étant précisément les principaux concernés avec des grands noms comme
Fates Warning,
Queensrÿche ou
Crimson Glory, qui demeurent avant tout foncièrement
Heavy d'un côté ; et
Shadow Gallery,
Manticora,
Twilight ou
Anubis Gate de l'autre pour ce qui est du
Power) ; les architectures plus iconoclastes de marginaux tels qu'
Ayreon,
Pain of Salvation,
Beyond Twilight ou
Devin Towsend ont davantage leur place dans ce musée (que ne renierait pas un Coronado).
Puis bon, ne serait-ce que pour ces belles paroles, le sujet méritait d'être une nouvelle fois remonté :
Ta'ayouch a écrit :avoir l'esprit PROG c'est vouloir des nouveautés, d'autres positions, un truc à trois de temps en temps ...