Après le doom underground la semaine dernière, le tut tut finlandais mainstream cette semaine.
Mon unique rencontre live avec Nightwish à ce jour remonte exactement à l'an 2000, à Wacken avec Tarja tournée Wishmaster, oui ça date. Sans être fan de toute l'histoire du groupe, j'ai quand même gardé une certaine tendresse pour leurs premiers albums, et je me dis que cette tournée best of / nostalgique serait l'occasion de confirmer que je suis bien devenu un vieux con. La suite me donnera raison.
Direction samedi soir à Stuttgart et la Porsche Arena, enfin juste la Schleyer Halle que d'autres salles jouxtent. A tel point qu'on ne sait pas trop vers où se diriger. Va pour le côté gauche, il n'y a que des têtes de bons pères de famille et de gens respectables propres sur eux qui rentrent, pas de cheveux longs ni de t-shirts moches pour l'instant, pas de doute ça doit bien être pour Nightwish.
Bon apparemment il y a un truc qui va commencer sur scène, ça permettra d'oublier que la bière est à prix prohibitif (pour l'Allemagne certes, pour Paris c'est les soldes).
Ah, j'entends "Night Crawler" du Priest en intro, je présume que ça va trancher du riff nan? Euh pas vraiment, mes aïeux c'est un festival de bontempi épileptique qui commence frénétiquement sans crier gare, on a dû infiltrer par erreur la soirée kitsch 80's de la discothèque à côté!
Tant pis, restons un peu ça a l'air très drôle, il y a des messieurs en noir sur scène qui bougent bien, font plein de bruit avec de la distorsion, des rythmes binaires poum tchac, et un batteur majorette qui maîtrise l'art du bras gauche en l'air. Par contre ils disent aussi des gros mots les méchants, punaise qu'est-ce que c'est devenu malpoli le bontempi de nos jours. Non parce que je n'entends toujours que ce bontempi endiablé, il faut absolument que je voie le génie derrière ça et qui fait tout l'intérêt hautement artistique de la prestation! Ah ben il n'est même pas sur scène en fait, tout est samplé...
Il reste qui alors? Le chanteur dispose d'un potentiel technique intéressant, franchement, mais il a aussi une passion dévorante pour l'alternance entre brailler (du grognement sourd) et brailler (du couinage suraigu). Les guitaristes? Bah euh ils ont de jolies guitares en V pour accompagner les mélodies playskool.
Ah tiens, une ballade, le monsieur qui prononce Stuttgart comme Stockholm demande de sortir les briquets, afin de communier corps et esprit tous ensemble sur cet élan de divine créativité. Ou pas. Thor soit loué, il arrête momentanément de forcer sa voix alors je veux bien le remercier d'épargner mes fragiles tympans pendant 5 minutes. Pas plus, cela reprend à fond la caisse par de nouvelles effluves de guimauve bontempiesques à 11 sur une échelle de 10, mon détecteur de cheese années 80 finissant par imploser dans des proportions intersidérales inégalées.

Quand ça se termine, je me dis que cet intermède était finalement bien comique pour patienter avant la première partie.
Ah, attendez, on me glisse dans l'oreille que c'était bien le groupe officiel de première partie de Nightwish... What the f*ck?! BEAST IN BLACK? Enchanté. Ah mais ouais, ils étaient bien habillés en black c'est vrai! Je ne sais pas où était le côté beast, Nightwish ça va paraître Morbid Angel à côté, mais en tout cas en dance beat ils sont imbattables.
Bon, après cette bonne blague j'espère que NIGHTWISH ne vont pas me faire regretter le déplacement. Remarquez, c'est l'avantage de prendre un groupe aussi ostensiblement vulgaire (je n'ai pas dit mauvais hein, rien à voir) en première partie, après tu peux jouer n'importe quoi on dirait Mozart ressuscité. Bien vu Nightwish, excellente stratégie.
L'intro façon film autobiographique, bien préparée, demande au public de ne pas utiliser son smartphone pour filmer. Consigne qui ne sera bien entendue pas respectée. Ouaip, même en Allemagne, l'allemand discipliné reste un bon gros cliché. Par contre l'allemand qui a trop d'argent au point où il va voir tous les concerts de sa ville juste pour passer le temps seul ou avec ses potes c'est bien la réalité, je ne sais pas si j'ai déjà vu autant de touristes à un concert. Ce n'est pas la première fois que je le remarque chez nos amis outre-Rhin, même dans des festivals underground comme la semaine dernière au Hammer of Doom, mais là vu le côté grand public c'est un stade encore supérieur de gens qui ne connaissent visiblement pas du tout le groupe, ou beaucoup plus gênant, qui passent 2 heures à discuter à voix haute sans regarder la scène! Quel intérêt?
Autant dire que l'ambiance est relativement terne pour une salle pleine à craquer de 15 000 personnes, à part sur quelques tubes simples du genre "Nemo" ou "I Want My Tears Back". Musicalement et scéniquement pourtant le groupe a fait des progrès monstrueux depuis mes vieux souvenirs, et Floor Jansen a parfaitement trouvé sa place, on dirait qu'elle est là depuis toujours. Même le guitariste Emppu n'a pas aligné les pains cette fois, miracle. Bon, on le sent quand même limite dès qu'il s'agit de jouer lentement, les traditions sont respectées.

La mise en scène est ultra soignée avec des projections permanentes sur écran géant couvrant toute la scène, pyrotechnie et compagnie, les grands moyens sont de sortie pour le spectacle du samedi soir! A 56€ la place, faut bien ça.
En termes de setlist je dois dire que j'ai là aussi été très positivement surpris, même si je m'en doutais vu le best of qu'ils viennent de sortir : les 3 titres de Oceanborn et Wishmaster que je préfère, pas mal de Once évidemment, quelques-uns des derniers, et 2 vieilleries inespérées du tout premier. Gros zoom sur la période Tarja donc, et notamment les titres les plus percutants.

Sur "The Carpenter" c'est Troy Donockley leur multi-instrumentiste couteau suisse qui assure le chant masculin (bien mieux que Tuomas sur album), quant à Marco Hietala avec sa verve habituelle reprend le rôle de la grosse voix grave narrative sur les titres de cette époque. Inutile de préciser que "Elvenpath" est métamorphosée.
Toutes ces vieilles chansons sont bien sûr un peu réarrangées au son du groupe actuel, parfois plus agressives, plus organiques en tout cas.
Sur les titres de Oceanborn, Floor transcrit les lignes vocales de Tarja un bon ton en-dessous, ce que je peux comprendre vu la difficulté, et ça passe très bien même si j'aurais aimé l'entendre relever le défi car elle en a sûrement les capacités. D'une manière générale elle est juste incroyablement solide et à l'aise, jamais une note à côté, et une spontanéité à toute épreuve.
Après une telle performance je me dis que je ne reverrai sans doute jamais un meilleur concert d'eux, ou du moins plus adapté pour moi, ce malgré le public lymphatique. Quoique il leur reste encore à jouer Oceanborn et Once en entier sur de futures tournées anniversaires.
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