ChaNoir a déjà tout dit sur le festival, bien situé d'ailleurs comparativement à son cousin le Keep It True, alors je passe direct à ce que j'ai vu, c'est à dire en arrivant tardivement le vendredi :
La prestation de
ERIC CLAYTON (AND THE NINE) est pour le moins déconcertante. Délocalisé aux Pays-Bas, le leader charismatique du combo culte de metal dramatique, gothique et surtout inclassable Saviour Machine n'a pas vraiment saisi qu'il jouait dans un festival metal et non dans une salle entre amis. En effet, le public s'attend évidemment à un show de Saviour Machine, autrefois assez populaire en Allemagne, éventuellement sous de nouvelles couleurs. Sauf que Clayton et son nouveau groupe batave font le choix de reprendre beaucoup de chansons des 70's, de son idole David Bowie notamment, de Lou Reed (la ballade "Perfect Day" jouée à l'ukulele!

) ou encore de Bob Dylan. De toute évidence ça s'avère être un trip excitant pour Clayton, mais sans cohérence aucune par rapport au reste du set, quand bien même le groupe essaie de leur donner une couleur plus gothique.
Les reprises sans être massacrées n'ont rien de transcendantales, "Helter Skelter" de qui vous savez est de loin la plus poussive, et en ouverture qui plus est. Alors en toute amitié, cher Eric : on a pas attendu 15 ans ce concert (dernière tournée en 2002) pour se retrouver avec un putain de jukebox.

Heureusement Clayton, désormais barbu tel un Gandalf mais toujours crane d’œuf sous son foulard et chapeau, reste un maestro baryton à la voix absolument unique dans le genre.

Il ne force plus tout le temps comme sur les premiers albums de Saviour Machine ici représentés, mais module et nuance intelligemment pour donner du relief et également sans doute se préserver. Son organe se chauffe tout au long du show jusqu'à donner quelques moments de pur frisson sur "Son of the Rain" et "Legion" du premier Saviour Machine.

Certains titres sont même réarrangés, plutôt avec bon goût, comme "Ascension of Heroes". Sur "The Mask", il ressort l’artifice du même nom qui était l'emblème du groupe à l'époque.
Malheureusement, toutes les inutiles reprises cassent le rythme et font retomber tout début d'emballement. Pire, le groupe n'a même plus le temps de jouer son gros classique "Carnival of Souls", frustration ultime avec un Clayton prétextant un problème de "backing track" qui ne fonctionnerait pas (?). Encore que c'est ce que j'ai vaguement compris, vu qu'il baragouine dans sa barbe entre les morceaux, autre problème de ce show bancal alternant le grandiose et le pénible.
Pourtant, cela aurait très bien pu être fantastique avec quelques efforts. Pas pour cette fois...
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WHILE HEAVEN WEPT sont dans leur tournée d'adieu, le groupe US ayant choisi de splitter. Malgré leur association avec l'étiquette doom, valable juste pour le premier album, leur musique est en réalité beaucoup plus diverse que ça, plutôt prog, épique, voire power à la fois, en tout cas romantique et mélancolique pour sûr. Oui c'est pour les tatas comme moi.
Pour un dernier concert allemand on peut percevoir l'émotion du guitariste leader Tom Philips, lequel commence le concert assis d'ailleurs (problèmes de santé?), avant de se relever pour ses soli et thèmes avares en notes mais pas en toucher.

Contrairement aux anciens albums il ne chante presque plus, la claviériste prenant le relais pour les chœurs.
Le groupe se concentre sur l'album Vast Oceans Lachrymose, joué aux 3/4 et dont le line-up est sur scène, ainsi que sur Of Empires Forlorn chanté plus grave qu'en studio à juste titre. Ce line-up dispose d'une alchimie évidente, même si celui de l'album final avec notamment les anciens membres de Fates Warning m'auraient convenu également.
Sur le karaokesque "Voice in the Wind", un fan au premier rang se voit charger de tout un couplet, avec une justesse et puissance très étonnante à cette heure avancée d'imbibation. Ce ne pouvait sûrement pas être un hasard.

Le public n'est certes pas bouillant, mais tout de même attentif et réceptif.
Enfin, pour l'anecdote, je crois que c'est bien la première fois que je vois un groupe jouer 2 morceaux de plus de 15 minutes (non rallongées par jam) dans le même set! Jamais chiants pour le coup.
Pas de fausse note donc pour cet au revoir digne, humble et sincère d'un groupe un peu en marge, peut-être trop le cul entre 3 chaises pour fidéliser un public sur le long terme, car pas assez doom pour certains, ou pas assez prog, ou pas assez heavy metal. Largement assez hammer of doom en tout cas.
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Samedi :
HÄLLAS sont jeunes et suédois, un seul album au compteur. Ils jouent du hard 70's avec de légères touches rétro de NWOBHM et de eye-liner. Les influences sont assez évidentes : Thin Lizzy (belles parties de guitare, leur point fort), Blue Öyster Cult pour les tonalités plus cosmiques, voire éventuellement un peu de Uriah Heep pour les arrangements. En revanche le chant un poil guttural se rapproche plus de Lemmy que de Ian Gillan, ce qui n'est pas désagréable, malheureusement les lignes de chant sont vraiment trop monolithiques à mon avis. Sur ce plan ne me demandez pas si c'est un homme ou une femme qui officie au micro/basse/cape, je ne voudrais pas faire d'impair. En tout cas il ou elle ou neutre n'a pas dit un mot au public de tout le concert, mais sans arrogance aucune, en laissant la musique parler. Manque d'assurance peut-être en revanche.
Musicalement ça reste bien agréable, avec "Star Rider" comme potentiel tube des futures expéditions sur Mars. Mais je ne suis pas 100% conquis non plus, outre le chant certains plans m'ont trop rappelé des chansons de Thin Lizzy. Beau potentiel à développer.
Je n'ai pas grand chose à dire sur
PALE DIVINE, un groupe US avec cette fois 20 ans d'expérience, si ce n'est que leur doom stonerisant limite grungy aux racines blues et rock 'n roll crasseux n'est pas franchement pour moi. J'ai tenu 2-3 titres, mais si vous aimez la distorsion sur 25 à faire vibrer le tympan et cette ambiance écrasante du doom US voire de Corrosion of Conformity, alors ce croisement Orange Goblin / St. Vitus ou bien encore Pentagram / Kyuss est pour vous.
A noter quand même les paroles visiblement ouvertement chrétiennes, donc sans doute moins subtiles que chez un Saviour Machine, mais je n'irai pas mener l'enquête.
STILLBORN sont encore plus vétérans puisqu'ils existent depuis 1984, et ça se sent tout de suite au vu de la mise en place. Leur histoire suédoise a pourtant l'air bien bordélique, ce soir c'est le line-up d'origine reformé qui se présente après de multiples changements, dont une période sous un autre nom avec Messiah Marcolin au chant. Je présume donc que c'est leur style originel qu'ils interprètent actuellement, mais je ne connais pas les albums pour en attester.
Il est intéressant de voir qu'avec une instrumentation assez simple, sans artifices, et des riffs percutants doomy bien sûr, le groupe parvient à créer une atmosphère lancinante pas évidente à définir. C'est probablement aussi ça le talent.

Le quatuor est porté par son bassiste/chanteur, immense et charismatique, dandinant et dominant, au chant gothique ponctué de quelques éructations death. Un bon moment inattendu, malgré que ce ne soit pas vraiment ma tasse de thé sur le papier.
SORCERER, encore des suédois décidément, sont en terrain conquis grâce à leur heavy / doom épique, beaucoup plus accessible et fédérateur que tout ce qui précède. Dans ces conditions il leur est facile de récolter immédiatement l'approbation du public.
Composé de vétérans qui ont fait leurs armes dans diverses pointures comme Therion et Tiamat après le split initial du groupe, Sorcerer revient de loin mais n'a donc aucun problème de professionnalisme, bien au contraire.
Bon ils pourraient se passer du drapeau floqué de leur nom, ce gimmick devient kitsch et trendy à la fois, en tout cas ils ont bien compris que leurs 2 albums bénéficient d'un certain buzz dans l'underground à la vue de leurs mines satisfaites.
Leur frontman Anders Engberg ne se ménage pas dans son style à la Tony Martin et tout le monde doome sa race joyeusement pendant une heure pour les fans de Candlemass et Solitude Aeturnus. Mais je dois avouer aussi que je m'attendais à un peu mieux niveau setlist, question de goût bien sûr, car je préfère le deuxième album au premier. Ouaip c'est pas true comme attitude, je sais. Reste que sur scène rien à dire ça envoie du royal doom épique à reprendre à tue tête en kermesse.
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BATUSHKA sont mignons comme tout, sur scène on dirait la brocante annuelle de la paroisse de quartier. Au point que je n'ai même pas vu le bassiste derrière tout ce bordel, par contre on voit bien les choristes encapuchonnés. Original comme groupe, du moins dans la mise en scène liturgique (même si on est très loin d'une véritable messe), voire un peu dans la musique tout de même, bien qu'ils ne soient pas les premiers à mélanger black metal et chorale (religieuse). Cet alliage est présenté sous un jour neuf, comme s'ils étaient volontairement en opposition l'un avec l'autre, et paradoxalement ça donne une certaine cohérence. Le fait qu'ils maintiennent l’ambiguïté permanente entre blasphème ou au contraire prosélytisme est également amusante.

En tout cas j'ai beaucoup aimé l'intro, où après avoir allumé 1457 bougies Ikea ils font monter très (très) lentement la pression avant le début de la chanson, conclue d'une attaque sonique brutale façon écrasement de moustique à coups de chandelier. Ce premier (long) titre est intéressant, mais une fois passées les ténèbres je me vois dans le besoin d'effectuer un passage satanique à la baraque à frites, suivi d'une infernale vidange de vessie et d'une inhalation diabolique de jus de pomme, puis je retourne 5 minutes donner une chance au black metal faussement russe orthodoxe. C'est là que je dois reconnaître que les trémolos et la mitraillette me passionnent autant que la lecture de l'Ancien Testament en letton. Alors ça sera tout pour moi, maintenant je vais écouter Babooshka de Kate Bush, über evil.
Pour
COVEN le décorum est moins poussé ou disons que ça ne prend pas 1 heure à installer. Je n'en attendais pas des miracles car je ne suis franchement pas plus amateur que ça de leur premier album "culte" de 1969, dont ils réutilisent la fameuse "véritable" messe noire (ultra kitsch) en guise d'intro cette fois.
Et bien c'est la bonne surprise, les chansons sont modernisées et réarrangées pour pouvoir être présentées dans un contexte actuel, limite métamorphosées. Ce qui donne un mélange rigolo et varié de rock 60's remuant, de mélodies popisantes et de doom metal sur fond d’ensorcellement par Jinx Dawson, à moins que ce ne soit d'enterrement.
La sorcière ne semble jamais vieillir, et son groupe de djeunz bien en place obéit au doigt et à l’œil à sa prêtresse de cérémonie. Bon vocalement ce n'est pas toujours idéal à mon goût, mais clairement ça semble voulu pour des effets de narration satano-luciféro-prout, car quand elle s'exécute sérieusement c'est juste.
Un écran géant accompagne le concert, soit pour des images de logo classiques et autres croix renversées, soit pour passer le clip associé à la chanson pour ceux qui auraient raté leurs superproductions du 7ème art. De quoi divertir ceux qui comme moi n'ont jamais été passionnés par ces compos, mais qui leur donneraient bien une nouvelle chance désormais après ce lifting réussi. Peut-être.
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