Bon, histoire de donner un développement un brin plus sérieux que cette impression succincte, ça poutrait méchamment.
Le centre-ville d'Essen n'étant pas particulièrement vaste, on a vite fait de faire le tour de ses quelques grand-places où trônaient cathédrales et autres échoppes dignes d'adorables petits marchés de Noël, même en Mars et sans Lee Dorrian, oui oui.
Bref, Le Turock lui-même est logé en face d'une église, au bas de la longue rue commerçante s'étendant depuis la gare centrale à la sorte de petite ceinture périphérique bordant les quartiers résidentiels plus au Nord, petite salle très chaleureuse partageant le charme convivial d'un Nouveau Casino, tant en termes de déco' que d'accueil général, et la capacité d'un Divan du Monde, à raison d'approximativement 500 personnes.
La salle est déjà bien remplie à l'ouverture des portes à 19h, et la programmation nous offre le privilège de débuter cette belle soirée en compagnie du
power trio folklo-prog-déjanté de
CRYPTEX, qui jouaient à quelques centaines de bornes de leur domicile, c'est-à-dire de Hannover.
Vus l'an dernier en compagnie de PAIN OF SALVATION pour la tournée desquels ils assuraient la première partie, les 3 multi-instrumentistes proposent une musique riche, alambiquée et minutieusement travaillée mêlant essentiellement influences de QUEEN ou JETHRO TULL, tout en agrémentant leurs compositions d'harmonies vocales d'un exquis effet, sans compter un panel d'instruments aussi insolites que les Sansula, Didgeridoo, Cajón ou encore Glockenspiel.
Et le moins qu'on puisse dire est que cette savante recette hétéroclite fait son effet, les titres colorés joyeusement
hippie alternant à merveille avec des phrasés plus incisifs et des
riffs autrement plus burnés, le
triumvirat de zicos se montrant passionné et habité du début à la fin.
Grande leçon de
Rock prog' original sachant encore sortir des sentiers battus, bravo messieurs.
Viennent ensuite les Britanniques d'ENOCHIAN THEORY, lesquels, s'ils viennent corroborer l'affiche au titre de caution
Metal prog', prouvent surtout qu'ils gonflent avant tout les rangs du genre d'un énième nom supplémentaire globalement peu inspiré et sans accroche véritable.
Raison pour laquelle je n'ai d'ailleurs pas le moindre regret d'en avoir loupé une portion du
set l'an dernier au Night Of The Prog, la suite ayant essentiellement été suivie d'une oreille distraite, faute d'intérêt.
Certes le finale plus joliment léché et aérien de la triplette "
Distances" / "
Inversions" / "
Singularities" aura son effet et ravira sans doute les cœurs des
aficionados du genre les plus ardus, mais en ce qui me concerne, la sauce ne prendra malheureusement pas du reste, et j'en viens à déplorer qu'ils n'aient pas laissé place à une prestation plus généreuse de CRYPTEX, sans compter le triste sort réservé à la conclusion de THRESHOLD, mais nous y venons...
Alors que l'affluence se fait de plus en plus compacte parmi les premiers rangs de la fosse au milieu de laquelle je me retrouve bien malgré moi calé à côté d'une paire de jolies blondes plantureuses, et que les musiciens de la tête d'affiche viennent tranquillement prendre place sur scène en décochant sourires à l'env
i, le chanteur Damian Wilson traverse le plus naturellement du monde ledit
snake pit dans le sens de la longueur, s'excusant jovialement du haut de son fort accent
cockney si charmant tout en serrant une poignée de louches, et me donnant une prompte tape sur l'épaule pour rejoindre l'estrade, lui aussi le sourire aux lèvres.
Ou comment rappeler à quel point, aux côtés de leurs confrères d'outre-Atlantique de FATES WARNING, le
Heavy à tendance progressive ne se résume pas à la grosse tête démonstrative de DREAM THEATER.
Là où le son était quasi-parfait pour les deux premiers groupes, hormis une légère prédominance occasionnelle de la batterie pour les premiers, et de la basse pour les seconds, la balance prendra le temps de quelques titres avant de surmonter l'étouffement superficiel occultant les harmoniques de guitares et des vocalises si efficaces de Wilson, à première vue méconnaissable sous sa grosse barbe écossaise.
Détail qui ne tardera pas à s'estomper de lui-même, permettant alors de prendre toute la mesure de la grande technique de cet équipage de musiciens concentrés et doués, mais pas moins enjoués pour autant.
Les fondateurs Karl Groom à la guitare soliste et Richard West aux claviers semblent asseoir la charpente scéniquement parlant, outre le fait de demeurer à ce jour les principaux compositeurs du groupe, mais c'est sans compter sur le charisme débordant de Damian, lequel ne manque pourtant pas de faire montre d'une humilité toute
British naturellement communicative de bonne humeur.
Sa prestation est à la hauteur de ses contributions passées auprès du
gang de Surrey, à l'époque de leur premier disque écologiquement engagé, le magnifique "
Wounded Land" de '93, et semble n'en être que décuplée sur scène tant sa fougue et sa force transcendent les lignes de chant.
De leurs côtés, le nouveau venu Pete Morten à la seconde guitare, Johanne James aux percus et Steve Anderson à la basse, construisent une fondation rythmique irréprochable qui prend aux tripes et vient chercher les soubresauts frénétiques au plus profond de nos âmes, en témoignaient la propension drastique du public à verser dans un
headbang débridé.
La part du lion est évidemment accordée à l'excellent "
March Of Progress" dont ils faisaient tout naturellement la promotion, ponctuée d'échantillons bien sentis de son ultra-énergique prédécesseur, "
Dead Reckoning" ('06), le dernier en compagnie du regretté Mac au chant, mais aussi de soupçons bienvenus de "
Subsurface" ('04), "
hypothetical" ('01) et "
Extinct Instinct" ('97), le tout toujours exécuté avec élégance, efficacité et prestance à toute épreuve.
On regrettera malheureusement un débordement sur les horaires prévus, qui nous feront passer le pourtant ô combien prometteur rappel composé du fabuleux dyptique "
light and space" / "
Slipstream" à la trappe !
L'absence de leur tube absolu, le si accrocheur "
Paradox" reste aussi un mystère, mais le(s ravages du) temps n'étai(en)t déjà pas de bonne augure ce soir-là de toute manière.
En gage de bonne foi et d'excuses sincères qu'il prendra toutefois le soin de ne pas étirer inutilement en longueur et en pathos, Damian Wilson, décidément très porté sur les bains de foule après avoir rejoint le public en fosse à plusieurs reprises au cours du concert, la banane et la vivacité toujours de son côté, nous proposera de le réceptionner dans son
stage dive en guise de substitut commun, tâche loin d'être évidente au passage au vu de la carrure toute en muscles du bonhomme.
Les musiciens de CRYPTEX et THRESHOLD viendront ensuite tous se joindre à la foule pour le bref apéro de clôture -aussi bien au bar qu'au cœur de la salle-, se prenant volontiers au jeu des autographes, photos et échanges chaleureux avec leurs fans, dans une grande disponibilité aussi louable que faisant chaud au cœur.
Rien à redire sur la perf', rien à redire sur l'attitude, merci les gars.
CRYPTEX :
01) Camden Town
02) It’s Mine
03) Gypsy’s Lullaby
04) Freeride
05) Alois
06) Mom
07) Romper Stomper
08) Grief and Despair
09) Knowledge
ENOCHIAN THEORY :
01) This Aching Isolation
02) Hz
03) Tedium
04) The Dimensionless Monologue
05) Movement
06) The Fire Around the Lotus
07) Distances
08) Inversions
09) Singularities
THRESHOLD :
01) Mission Profile
02) Don’t Look Down
03) Hollow
04) Coda
05) Part Of The Chaos
06) Colophon
07) Pilot In The Sky Of Dreams
08) Ashes
09) Angels
10) Staring At The Sun
11) long way home
12) The Rubicon
Rappels prévus :
13) light and space
14) Slipstream